Personne le connaissait, son nom… MĂ ÂŞme s’il en avait forcĂ©ment un, comme tout le monde… Le facteur, tu le voyais jamais aller jusqu’Ă Â sa bicoque… En mĂ ÂŞme temps, faut dire qu’avec ses chiens, à §a donnait guère envie… Des bĂ ÂŞtes comme à §a, on devrait pas avoir le droit… D’accord, ils Ă©taient attachĂ©s, mais quand mĂ ÂŞme… Il est mort quand « Le Bouc  » ?… Il paraĂ®t qu’il y avait un bordel dans la baraque… Presque pire que devant Ă Â ce qu’on m’a dit !… MĂ ÂŞme au dĂ©but on l’appelait comme à §a, « Le Bouc  »â€¦ Il me semble bien que oui… Il s’est installĂ© sans rien demander Ă Â personne… Combien de temps qu’elle Ă©tait fermĂ©e l’usine ?… Qu’Ă Â la mairie, ils aient laissĂ© faire à §a, je te dirais bien que j’ai jamais compris… Un gars que personne connaissait, mĂ ÂŞme pas lever le petit doigt pour l’empĂ ÂŞcher de squatter la maison du concierge… S’il avait vu à §a, le pauvre gars, dans quel Ă©tat qu’il l’avait mise sa maison !… Toutes les saloperies qu’il ramenait… Pas plus ferrailleur que toi ou moi, jamais il vendait quoi que ce soit... Il entassait, c’est tout !… à € la mairie, s’ils avaient vraiment voulu le virer… Rien que du point de vue de l’hygiène… Heureusement qu’il avait pas de voisins… Insupportable que à §’aurait Ă©tĂ© pour l’odeur… MĂ ÂŞme quand tu faisais que le croiser… Le patelin est pas bien grand, alors forcĂ©ment tu le croisais de temps en temps… MĂ ÂŞme s’il sortait pas souvent… Par contre, tu pouvais pas le manquer : avec sa cotte toute crado sur le dos qu’il allait faire ses courses… Il prenait jamais la peine de se changer… MĂ ÂŞme pas sĂ Â »r qu’il ait eu de quoi… Une cotte couverte de cambouis, fallait voir à §a… Du genre qui aurait tenu debout toute seule !… à € la supĂ©rette qu’il allait… Toujours Ă Â la supĂ©rette… Plus d’une fois que je l’ai croisĂ© lĂ Â -bas… Avec ses deux gros sacs dans chaque main… Il lui fallait bien à §a pour ramener ses litres !… C’est pas à §a qui l’empĂ ÂŞchait de rouler… Tout le temps Ă Â rà ´der… Et son camion !… Une Ă©pave !… Y en a qui disent qu’il aurait Ă©tĂ© artisan dans le temps : j’ai du mal Ă Â y croire !… C’est comme ceux qui le disaient chaud lapin… Il avait dĂ Â » sacrĂ©ment changer depuis ce temps-là  … Elle est pas nĂ©e celle qu’en aurait voulu d’un gars tout cassĂ© comme il Ă©tait… C’Ă©tait plus un dos qu’il avait !… Tu penses, Ă Â se transbahuter toutes ses saloperies Ă Â longueur de journĂ©e !… On m’à ´tera pas de l’idĂ©e qu’il avait plus toute sa tĂ ÂŞte… DĂ©jĂ Â , rien qu’avec tout ce qu’il avalait… De la vinasse, fallait voir !…
*
Le truc qui me faisait le plus flipper, c’Ă©tait ses chiens… En mĂ ÂŞme temps, tu comprends qu’il ait eu envie d’Ă ÂŞtre peinard, tu vois… Le mec, il avait rien demandĂ© Ă Â personne… Il vivait sa vie, point barre… Ici, c’Ă©tait peut-Ă ÂŞtre pas le bon endroit pour ce genre de trip… Chaque fois que j’allais rĂ©pĂ©ter au local, je mettais mon Ă©tui de guitare entre moi ses chiens… Il avait laissĂ© pile la longueur de chaĂ®ne qu’il fallait… Trop flippant… Il faudrait Ă©crire une chanson un jour, sur lui… T’en croises pas cinq dans ta vie des mecs comme lui… Jusqu’au bout de son trip il Ă©tait allé… C’est fort, à §a… Couper les ponts comme à §a, je sais pas si j’en serais capable… En tout cas, pour moi, pas maintenant, tu vois… Un truc un peu psyché… J’avais notĂ© juste un titre, une fois : Talking with the dead man… Toute ma vie, je m’en souviendrai… Trop fort, tu vois… Il m’avait bien mordu son putain de clĂ©bard… Un truc de dingue qu’on a vĂ©cu ce soir-là  … Comment j’ai hallucinĂ© grave quand il nous a dit d’entrer… Comment il a levĂ© la main pour calmer ses chiens… Juste un geste et ils filaient doux, tu vois… DĂ©jà  à §a, tu vois… Et puis l’ambiance… Il faisait nuit et tout… On avait fumĂ© grave aussi… « Le Bouc  » qui nous appelle et tout… MĂ ÂŞme il nous fait rentrer, tu vois… Un bordel lĂ Â -dedans !… Des machines Ă Â laver dĂ©sossĂ©es, des vieilles tĂ©lĂ©s, des ordis dĂ©montĂ©s… Des piles, j’te jure !… Et comment il t’a soignĂ© la main… C’Ă©tait trop flippant… Des espèces d’herbes sĂ©chĂ©es qu’il a sorties d’un bocal… Il marmonnait un truc, style chaman et tout… Il nous a mĂ ÂŞme servi un coup de gnà ´le, le mec… Cool, tu vois… Une bouteille trop stylĂ©e, avec une vipère dedans… J’te jure, une vipère !… C’est quand on a voulu partir que je l’ai senti un peu mal… Comment il t’a chopĂ© la main !… Le mec, il m’arrache une bague, tu vois… On a rien vu venir… Direct, le mec… Il prend la bague et il me fait… Un truc style : comment tu peux porter des morts dont tu connais mĂ ÂŞme pas le nom, tu vois… Un truc Ă©norme !…
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Un étrange à ªtre humain (ou plusieurs) vivant dans une vieille maison en ruine loin des quartiers populaires (soit dans le vieux Nord-Est ou un pays lointain et exotique). On le soupà §onne (en se basant sur sa silhouette et ses habits) de n՚à ªtre pas complètement humain.
H. P. Lovecraft, The Commonplace Book, note 212.
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