L՚histoire est simple. Ou tout du moins le semble. Car sous ses dehors de roman bourgeois, Le Charme d՚une autre dissimule une complexité à  laquelle les lecteurs fidèle d՚Henri de Kermarec sont désormais habitués. Charles et ses mésaventures conjugales ne sont que prétexte, comme ne tarde pas à  nous le révéler le narrateur, désinvolte et malicieux à  souhait : Que notre veuf rencontre une jolie jeune femme dans la salle d՚attente de son cabinet d՚affaires ne vous étonnera certes pas. Mais à  quoi bon vous surprendre ? Puisque l՚essentiel n՚est jamais là  où on le croyait. Emma, la nouvelle égérie de Charles, n՚est autre en effet que l՚arrière-petite fille du célèbre capitaine Cook : Il avait été le premier à  remonter jusqu՚à  la source du fleuve Niger. Il y avait longtemps de cela. Trop peut-à ªtre pour que quiconque prenne encore le soin de célébrer sa mémoire.
Le vaudeville cède ainsi rapidement du terrain, lÕšarchéologie familiale reléguant les frasques amoureuses de Charles au second plan, ce qui permet au romancier de rehausser son récit dÕšune dimension, n’ayons pas peur des mots, philosophique : Tous deux fouillaient ce grenier inlassablement. Sans doute avaient-ils compris que lÕšhomme nÕšest libre quÕšune fois brisés les liens du sang et les chaînes du passé. Qui gratte le vernis de la mémoire – surtout familiale ! – doit sÕšattendre à  toute sorte de découvertes plus ou moins reluisantes. Ici, aux affres de lÕšhistoire coloniale se mà ªlent les turpitudes dÕšune bourgeoisie engoncée dans ce quÕšelle croit encore à ªtre des principes, mais qui ne sont que des alibis bien utiles pour masquer ces errances. Dans la famille dÕšEmma comme chez tant dÕšautres quÕšil connaissait, lÕšimmobilisme bourgeois se repaissait avec avidité de kilomètres parcourus, entretenant à  force de continents visités lÕšillusion d՚à ªtre encore en vie. Jouant alors dÕšune malicieuse métaphore cartographique, Henri de Kermarec entraîne ses personnages dans un voyage sans retour dont ils ne sortiront pas indemnes : On monte un beau matin dans un tramway nommé désir, et on se retrouve soudain au bout de la nuit, avec seulement lÕšenvie dÕšhurler. QuÕšajouter de plus, sinon que le dénouement de cette méditation poignante sur le couple et la mémoire en déroutera plus dÕšun ?
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