Je marche sur la route de Saint-Laurent. les échappés de vue ménagées par de longues clairières qui s’ouvrent maintenant en tous sens à  travers le bocage obsèdent l՚œil presque partout et rafraîchissent le sentiment de la promenade. Les fermes que j’ai connues pendant un demi-siècle emmurées par les haies, hostiles et soupà §onneuses, remparées de clà ´tures d’épines, alertées de loin contre toute approche par des abois de chiens hargneux, semblent cligner de toutes leurs fenà ªtres comme une bonne auberge, dérouler de loin un tapis vert jusqu’au bord de la route pour inviter la flà ¢nerie du passant. (...) Toute la contrée des Mauges me fait penser quand je m’y promène à  une demeure longtemps endeuillée qui une à  une rouvrirait ses fenà ªtres ; un ban semble levé qui pesait sur cette terre méfiante et sauvage : on enlève les housses, les maisons blanches sont nues et claires dans l’air qui les baigne comme une lessive de printemps.
Julien Gracq, Lettrines 2
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