Lu Les Amazones de Josée Marcotte. Pour situer, ce qu’on peut lire sur la quatrième de couverture :
à € l՚aube du millénaire post-capitaliste, le monde est en guerre. Dans une caverne sombre de la forà ªt bordant le grand fleuve, deux Amazones se cachent. De qui, de quoi ? Depuis leur naissance, elles n՚ont connu que l՚emprise de leurs dirigeantes, les manœuvres militaires, les purges et les catharsis, la mémoire scellée par le babil quotidien, et la Loi du ventre vide. Une vie à  sens unique au nom du combat contre l՚Autre, le clan des hommes. à € distance du chaos, Morphale rapporte ce qu՚elle a vu, alors que Tirésia se souvient de ses sœurs d՚armes : Julianna, Malanie, Emrala, Vania, Tori, Lizgoth, Bérénice, Artémise…
à ‰criture qui s’ancre dans le fantastique, comme une fausse naà ¯veté qui donne encore plus de force aux images proposées. Exemple : L’apprentie jardinière séparait les branches du pied mère, les émancipait. Avec des sourires bienveillants, comme ceux qu’on adresserait à  sa progéniture. Elle dirigeait les tiges, les branches, pour les ancrer à  nouveau dans le sol fertile de la nuit. De cette terre pouvait jaillir mille plantes insolites, cauchemardesques, carnivores ou merveilleuses. La Muette n’avait qu’à  répéter ses gestes. Et retrouver ce goà  »t du dynamitage de langue avec le sourire, comme dans le travail poursuivi sur Marge autofictive, avec notamment Nicole :Des titres de livres qu’elle n’écrirait jamais lui trottaient dans la tà ªte, se bousculaient par centaines. Mention spéciale à  Orang en emporte l’outan. Mais aussi fable politique et tellement d’échos à  l’aujourd’hui qui s’effondre sous le vide qu’il génère : Mais comment avons-nous fait pour mourir si longtemps ?), travail de réécriture : Merci au vingtième siècle dÕšavoir donné naissance à  des Å“uvres démesurées, qui nous aident, sinon à  comprendre, du moins à  exhiber lÕšesprit humain sous tous ses aspects, toutes ses couleurs innombrables., écriture du corps (terrible métaphore de la nudité) et ode à  la rencontre : Si la vraie vie est absente, nous irons la reprendre. Morphale et moi irons de lÕšavant, pour toutes ces femmes qui nÕšont pas su, nous inventerons le début dÕšun monde où la rencontre avec lÕšAutre est possible. Nous sortons de cette grotte dÕšattente mortificatoire pour aller vers eux, conscientes et consentantes, et engager notre vraie nudité.
Les Amazones de Josée Marcotte est édité en version numérique et papier par les éditions de l’instant mà ªme. Version papier disponible en France à  la librairie du Québec à  Paris, sur commande. Autres ouvrages de Josée : La petite Apocalypse illustrée, Publie.net, 2012, Marge, Publie.net & Publie.papier, 2010.
Le fleuve est une identité abstraite.
La douce dislocation de l՚à Štre entraîne Glauké du cà ´té du sommeil, dans ce fragment de seconde où on soulève des montagnes pour créer des paysages incongrus, et cette fois-ci, elle gémit. La nuit chaude la gagne. Son rà ªve la pousse dans l՚obscurité d՚un monde révolu, mais pas si lointain.
CÕšest elle, mais ce nÕšest pas elle.
Glauké se lève d՚un lit douillet, un matelas tout ce qu՚il y a de plus ordinaire, ni trop grand ni trop petit, se dirige instinctivement dans une autre pièce où se trouve la douche, toute de carrelages colorés, de céramiques, avec lavabo et large miroir bien poli, et toilette blanche propre. Elle utilise les commodités, comme si elle avait fait à §a toute sa vie, se sèche avec la grande serviette de bain, puis retourne dans la chambre, fouille dans les tiroirs de l՚unique commode et en retire un pantalon noir, des sous-và ªtements beiges, culotte et soutien-gorge assortis, de fines chaussettes noires de coton, enfile un chemisier blanc extirpé de la penderie. Ainsi và ªtue, elle ramasse ses cheveux, élabore un joli petit chignon bien serré, qu՚elle stabilise d՚une pince. Satisfaite, elle se dirige vers la cuisine où elle se verse un jus d՚orange, met une tranche de pain à  griller avant de l՚enduire de confiture aux fraises et de la manger à  table, sur un petit napperon brun. Une fois le déjeuner terminé, elle va jeter les miettes et déposer la vaisselle dans l՚évier, ensuite, elle retourne à  la salle de bains, prend la brosse à  dents dans le petit gobelet, y dépose de la pà ¢te dentifrice, pas plus gros que la grosseur d՚un pois, met l՚engin dans sa bouche, frotte de haut en bas et de bas en haut, et de gauche à  droite, partout, crache dans le lavabo, rince, voilà  , maintenant c՚est fait. Elle ferme l՚interrupteur de la pièce, se rend à  la cuisine prendre ses clefs sur la table et la mallette sur le pas de la porte, puis enfile ses chaussures. Elle est prà ªte à  aller travailler… Glauké émerge de cette balade en apnée avec un cri de mort, le sien, inévitablement en sueurs, tremblotante et complètement terrifiée.
Josée Marcotte, Les Amazones
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