lu photo de classe/s hier soir - récits de rencontres avec des parents d’élèves - aurait été dommage de ne pas en faire littérature - des moments qu’on connaît - ce que disent les corps, les mains, les fringues choisies pour venir - et ces non-dits qui lestent ces entretiens - jusqu’à ce que craquent les apparences - sur un regard du gosse, un silence, un mot à partir duquel tout bascule - qu’il ne reste plus qu’à se taire et s’en aller, ou commencer à parler - ces monologues, pas si souvent qu’on échange - et tout le dehors qui déboule dans une école qui se ràªve sanctuaire - le dehors et ces violences sociales, ces parcours individuels où toutes les formes de rupture - revoir des visages pendant la lecture - se dire qu’au lycée ils sont trop vieux pour encore se ràªver footballeur - chaleur revenue - les iris fanent - sont passés fleurs disait ta mère - roses sortent
Extrait :Lassitude, insatisfaction, frustration lestent le plus souvent l՚ordinaire de ces fins de journée : ce qu՚on n՚a pas fait, ce qu՚on aurait dà » faire, ce que, pressé, on a bà¢clé, ce qu՚il reste à faire qui semble soudain insurmontable et provoque ces insomnies récurrentes, parce qu՚on y croit, fait mine d՚y croire encore au pouvoir salvateur de l՚école, au marche-pied social qu՚elle représente, préférant ignorer les statistiques qui le démentent avec constance, préférant croire à l՚espoir d՚une transmission capable de hisser sur nos épaules ces enfants de prolétaires, de laissés-pour-compte à l՚ambition émoussée, éteinte, morte, comme si leur vie était faite déjà , héritiers des maigres ràªves de leurs parents, résignés par avance à l’avenir qu’on daigne leur concéder, ailes mutilées avant màªme l’envol.
Jean-Pierre Suaudeau, Photo de classe/s, publie.net
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