Où de nouveau la réflexion se porte sur le mariage :
Quand le malheur se dresse entre deux à ªtres qui ont entrepris de se rendre l’un à  l’autre la vie agréable et facile à  porter, il naît du contact produit par une intimité continuelle qui n’existe point entre deux jeunes gens à  marier, et ne saurait exister tant que les mÅ“urs et les lois ne seront pas changées en France. Tout est tromperie entre deux à ªtres près de s’associer ; mais leur tromperie est innocente, involontaire.
Le sujet de cette étude n’est pas dans la transition du garà §on à  l’état d’homme marié, peinture qui, largement composée, ne manquerait point de l’attrait que prà ªte l’orage intérieur de nos sentiments aux choses les plus vulgaires de la vie. Les événements et les idées qui amenèrent le mariage de Paul avec mademoiselle à ‰vangélista sont une introduction à  l’Å“uvre, uniquement destinée à  retracer la grande comédie qui précède toute vie conjugale.
la cause principale des désunions conjugales se trouve dans une cohésion constante qui n’existait pas autrefois, et qui s’est introduite dans ce pays-ci avec la manie de la famille. Depuis la révolution qui s’est faite en France, les mÅ“urs bourgeoises ont envahi les maisons aristocratiques. Ce malheur est dà  » à  l’un de leurs écrivains, à  Rousseau, hérétique infà ¢me qui n’a eu que des pensées anti-sociales et qui, je ne sais comment, a justifié les choses les plus déraisonnables. Il a prétendu que toutes les femmes avaient les mà ªmes droits, les mà ªmes facultés ; que, dans l’état de société, on devait obéir à  la nature ; comme si la femme d’un grand d’Espagne, comme si toi te moi, nous avions quelque chose de commun avec une femme du peuple ? Et, depuis, les femmes comme il faut ont nourri leurs enfants, ont élevé leurs filles et sont restées à  la maison. Ainsi la vie s’est compliquée de telle sorte que le bonheur est devenu presque impossible, car une convenance entre deux caractères semblable à  celle qui nous fait vivre comme deux amies est une exception. Le contact perpétuel n’est pas moins dangereux entre les enfants et les parents qu’il l’est entre les époux.
Où l’essentiel (pour comprendre le monde et l’écrire) est d’appartenir à  la catégorie des observateurs :
Paul aurait dà  » posséder non seulement les sciences de Lavater et de Gall, mais encore une science de laquelle il n’existe aucun corps de doctrine, la science individuelle de l’observateur et qui exige des connaissances presque universelles.
et d’emprunter aux naturalistes :
Les naturalistes nous ont dépeint les mÅ“urs de beaucoup d’animaux féroces ; mais ils ont oublié la mère et la fille en quà ªte d’un mari. Ce sont des hyènes qui, selon le Psalmiste, cherchent une proie à  dévorer, et qui joignent au naturel de la bà ªte l’intelligence de l’homme et le génie de la femme.
Où le nom demeure central :
Quand mon mari m’épousa, je n’avais que mon nom et ma personne. Mon nom seul valait pour lui des trésors auprès desquels pà ¢lissaient les siens.Quelle fortune égale un grand nom ? Ma dot était la beauté, la vertu, le bonheur, la naissance, l’éducation. L’argent donne-t-il ces trésors ?
Où l’observateur sait l’envers du décor :
Il n’était pas le Misanthrope, il était un vieux notaire, habitué par son métier aux adroits calculs des gens du monde, à  ces habiles traîtrises plus funestes que ne l’est un franc assassinat commis sur la grande route par un pauvre diable, guillotiné en grand appareil. Pour la haute société, ces passages de la vie, ces congrès diplomatiques sont comme de petits coins honteux où chacun jette ses ordures.
et se livre parfois à  des élucubrations douteuses :
Incapable d’observer la différence que le caractère créole mettait entre sa belle-mère et les autres femmes, il pouvait encore moins en soupà §onner la profonde habileté. La créole est une nature à  part, qui tient à  l’Europe par lÕšintelligence, aux Tropiques par la violence illogique de ses passions, à  l’Inde par l’apathique insouciance avec laquelle elle fait ou souffre également le bien et le mal ; nature gracieuse d’ailleurs, mais dangereuse comme un enfant est dangereux s’il n’est pas surveillé. Comme l’enfant, cette femme veut tout avoir immédiatement ; comme un enfant, elle mettrait le feu à  la maison pour cuire un Å“uf. Dans sa vie molle, elle ne songe à  rien ; elle songe à  tout quand elle est passionnée. Elle a quelque chose de la perfidie des nègres qui l’ont entourée dès le berceau, mais elle est aussi naà ¯ve qu’ils sont naà ¯fs.
Où argent et pouvoir sont indissociables :
Les notaires sont donc obligés de suivre la marche des affaires politiques, qui maintenant sont intimement liées aux affaires des particuliers. En voici un exemple. Autrefois les familles nobles avaient des fortunes inaliénables que les lois de la révolution ont brisées et que le système actuel tend à  reconstruire, reprit le vieux notaire
Où on s’embarque pour Calcutta.
Où on voit un notaire épouser une mulà ¢tresse.
Où les dandys parfois sombrent :
_Qui reconnaîtrait dans cet homme que vous voyez là  , près du vieux Mathias, ce dandy que l’on avait nommé la Fleur des pois, et qui faisait, il y a cinq ans à  Bordeaux, la pluie et le beau temps ?
_Quoi ! ce gros petit homme en redingote d’alpaga, qui a l’air d’un cocher, serait le comte Paul de Mannerville ?
Où Balzac définit la dépression :
à € qui n’arrive-t-il pas d’à ªtre abandonné de l’esprit qui soutient notre frà ªle machine et d’écouter la puissance inconnue qui nie tout ?
Où est évoqué le déni de ce qui est décrit pour mieux sauver les apparences (et où la fiction revendique de dévoiler le réel) :
En apprenant ces tragi-comédies, beaucoup de gens refusent d’y croire ; ils prennent le parti de la nature humaine et de ses beaux sentiments, ils soutiennent que c’est des fictions. mon cher, Talleyrand a dit ce magnifique mot : Tout arrive ! Certes il se passe sous nos yeux des choses encore plus étonnantes que ne l’est ce complot domestique ; mais le monde a tant d’intérà ªt à  les démentir, à  se dire calomnié ; puis ces magnifiques drames se jouent si naturellement, avec un vernis de si bon goà  »t, que souvent j’ai besoin d’éclaircir le verre de ma lorgnette pour voir le fond des choses.
Où parfois se fait un écho trouble au présent :
Pour triompher, nous irons jusqu’à  nous réunir à  La Fayette, aux Orléanistes, à  la Gauche, gens à  égorger le lendemain de la victoire, car tout gouvernement est impossible avec leurs principes. Nous sommes capables de tout pour le bonheur du pays et pour le nà ´tre. (...) La politique (...) est dans l’impulsion à  donner à  la nation en créant une oligarchie où demeure une pensée fixe de gouvernement et qui dirige les affaires publiques dans une voie droite, au lieu de laisser tirailler le pays en mille sens différents, comme nous l’avons été depuis quarante ans dans cette belle France, si intelligente et si niaise, si folle et si sage, à  laquelle il faudrait un système plutà ´t que des hommes. Que sont les personnes dans cette belle question ? Si le but est grand, si elle vit plus heureuse et sans troubles, qu’importe à  la masse les profits de notre gérance, notre fortune, nos privilèges et nos plaisirs ?
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