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au fil des jours

imaginons Pontoise

En train de travailler sur le vase communicant d’octobre avec Mathilde Roux, point de départ donné pour l’écriture les mots qui figurent sur le bandeau de son site : Tu me demanderas pourquoi je ne mÕšarràªte pas un jour de plus à . 0,45 secondes plus tard, découvrir grà¢ce à Google pépite Nerval, la recopier ici :

Tu me demanderas pourquoi je ne m’arràªte pas un jour de plus à Constance, afin de voir la cathédrale, la salle du concile, la place où fut brà »lé Jean Huss et tant d’autres curiosités historiques que notre Anglais de la table d’hà´tes avait admirées à loisir. C’est qu’à la vérité je ne voudrais pas gà¢cher davantage Constance dans mon imagination. Je t’ai dit comment, en descendant des gorges de montagnes du canton de Zurich, couvertes d’épaisses foràªts, je l’avais aperà§ue de loin, par un beau coucher de soleil, au milieu de ses vastes campagnes inondées de rayons rougeà¢tres, bordant son lac et son fleuve comme un Stamboul d’Occident ; je t’ai dit aussi combien, en approchant, on trouvait ensuite la ville elle-màªme indigne de sa renommée et de sa situation merveilleuse. J’ai cherché, je l’avoue, cette cathédrale bleuà¢tre, ces places aux maisons sculptées, ces rues bizarres et contournées,et tout ce moyen à¢ge pittoresque dont l’avaient douée nos décorateurs d’Opéra ; eh ! bien, tout cela n’était que ràªve et qu’invention : à la place de Constance, imaginons Pontoise, et nous voilà davantage dans le vrai. Maintenant, j’ai peur que la salle du concile ne se trouve àªtre une hideuse grange, que la cathédrale ne soit aussi mesquine au dedans qu’à l’extérieur, et que Jean Huss n’ait été brà »lé sur quelque fourneau de campagne. Hà¢tons-nous donc de quitter Constance avant qu’il fasse jour, et conservons du moins un doute sur tout cela, avec l’espoir que des voyageurs moins sévères pourront nous dire plus tard : "Mais vous avez passé trop vite ! Mais vous n’avez rien vu !"
Aussi bien, c’est une impression douloureuse, à mesure qu’on va plus loin, de perdre, ville à ville et pays à pays, tout ce bel univers qu’on s’est créé jeune, par les lectures, par les tableaux et par les ràªves. Le monde qui se compose ainsi dans la tàªte des enfants est si riche et si beau, qu’on ne sait s’il est le résultat exagéré d’idées apprises, ou si c’est un ressouvenir d’une existence intérieure et la géographie magique d’une planète inconnue. Si admirables que soient certains aspects et certaines contrées, il n’en est point dont l’imagination s’étonne complètement, et qui lui présentent quelque chose de stupéfiant et d’inouà¯. Je fais exception à l’égard des touristes anglais, qui semblent n’avoir jamais rien vu ni rien imaginé.
Nerval, Voyages en Orient

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