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traversée Balzac

Les Célibataires | Le Curé de Tours

Où Balzac pratique l’archéologie urbaine (et associe antiquaire et littéraire) :

Jadis, il existait dans le Cloître, du côté de la Grand’rue, plusieurs maisons réunies par une clôture, appartenant à la Cathédrale et où logeaient quelques dignitaires du Chapitre. Depuis l’aliénation des biens du clergé, la ville a fait du passage qui sépare ces maisons une rue, nommée rue de la Psalette, et par laquelle on va du Cloître à la Grand’rue. Ce nom indique suffisamment que là demeurait autrefois le grand Chantre, ses écoles et ceux qui vivaient sous sa dépendance. Le côté gauche de cette rue est rempli par une seule maison dont les murs sont traversés par les arcs-boutants de Saint-Gratien qui sont implantés dans son petit jardin étroit, de manière à laisser en doute si la Cathédrale fut bâtie avant ou après cet antique logis. Mais en examinant les arabesques et la forme des fenêtres, le cintre de la porte, et l’extérieur de cette maison brunie par le temps, un archéologue voit qu’elle a toujours fait partie du monument magnifique avec lequel elle est mariée. Un antiquaire, s’il y en avait à Tours, une des villes les moins littéraires de France, pourrait même reconnaître, à l’entrée du passage dans le Cloître, quelques vestiges de l’arcade qui formait jadis le portail de ces habitations ecclésiastiques et qui devait s’harmonier au caractère général de l’édifice.

Où est mis en scène un homme ignorant tout du monde :

l’abbé Birotteau, dont la bonté allait jusqu’à la bêtise, dont l’instruction n’était en quelque sorte que plaquée à force de travail, qui n’avait aucune expérience du monde ni de ses mœurs, et qui vivait entre la messe et le confessionnal, grandement occupé de décider les cas de conscience les plus légers, en sa qualité de confesseur des pensionnats de la ville et de quelques belles âmes qui l’appréciaient, l’abbé Birotteau pouvait être considéré comme un grand enfant, à qui la majeure partie des pratiques sociales était complétement étrangère.

Où le vide d’une vie :

La nature de ses chagrins interdisait à Birotteau, homme d’expansion, aimant à être plaint et consolé, la petite douceur de les raconter à ses amis. Le peu de tact qu’il devait à sa timidité lui faisait redouter de paraître ridicule en s’occupant de pareilles niaiseries. Et cependant ces niaiseries composaient toute son existence, sa chère existence pleine d’occupations dans le vide et de vide dans les occupations ; vie terne et grise où les sentiments trop forts étaient des malheurs, où l’absence de toute émotion était une félicité.

Ce n’était plus que le squelette du Birotteau qui roulait, un an auparavant, si vide mais si content, à travers le Cloître.

Où l’un des mots-clés est habitude :

Abandonner Tours ? s’écria le vicaire avec un effroi indescriptible.

C’était pour lui une sorte de mort. N’était-ce pas briser toutes racines par lesquelles il s’était planté dans le monde. Les célibataires remplacent les sentiments par des habitudes. Lorsqu’à ce système moral, qui les fait moins vivre que traverser la vie, se joint un caractère faible, les choses extérieures prennent sur eux un empire étonnant. Aussi Birotteau était-il devenu semblable à quelque végétal : le transplanter, c’était en risquer l’innocente fructification. De même que, pour vivre, un arbre doit retrouver à toute heure les mêmes sucs, et toujours avoir ses chevelus dans le même terrain, Birotteau devait toujours trotter dans Saint-Gatien ; toujours piétiner dans l’endroit du Mail où il se promenait habituellement, sans cesse parcourir les rues par lesquelles il passait, et continuer d’aller dans les trois salons, où il jouait, pendant chaque soirée, au wisth ou au trictrac.

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